Le Tchad a récemment surpris la scène internationale en mettant fin à son accord de défense avec la France, un partenariat emblématique vieux de plusieurs décennies. Annoncée le 28 novembre, cette décision marque une volonté affichée de N’Djamena de redéfinir sa souveraineté face à des relations jugées inégales avec l’ancienne puissance coloniale.
Des tensions diplomatiques et sécuritaires seraient à l’origine de cette décision. En octobre, lors d’une attaque significative de Boko Haram dans la région du Lac Tchad, la France a manqué de porter assistante à l’armée tchadienne, exacerbant les frustrations de N’Djamena. Cette absence de soutien a été perçue par beaucoup d’observateurs comme un manque de réciprocité dans les engagements bilatéraux.
Lors d’une visite récente du ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, la situation s’est envenimée sur fond d’une volonté française que le Tchad garde une neutralité dans les conflits régionaux. En plus de cela la France aurait également suggéré un report des élections prévues en décembre. Ces demandes ont été interprétées comme une ingérence dans les affaires internes, suscitant l’irritation des autorités tchadiennes.
Le président tchadien a défendu cette décision comme un acte de souveraineté nationale, déclarant que l’accord de défense n’était plus adapté aux réalités géopolitiques actuelles.
Des manifestations en soutien à la décision
Sur le terrain, cette annonce a été accueillie avec ferveur par une partie de la population. À N’Djamena, des centaines de manifestants, majoritairement des jeunes, ont exprimé leur soutien à la rupture, arborant des pancartes avec les slogans "Tchad hourra, France barra" ("Dehors la France"). Ces rassemblements, bien que pacifiques, traduisent une volonté populaire de voir le Tchad affirmer son indépendance stratégique.
Cette rupture vient s’ajouter à une série de revers pour Paris en Afrique de l’Ouest. Après le retrait de ses forces du Mali, du Burkina Faso et du Niger, le Tchad représentait l’un des derniers partenaires stratégiques de la France dans la région. Désormais, même ce lien semble compromis, tandis que d’autres pays comme le Sénégal réclament également la fermeture des bases françaises.
Vers une nouvelle ère pour le Tchad ?
La mise en œuvre de cette décision est confiée à une commission spéciale, qui a déjà entamé ses travaux. À Paris, le Quai d’Orsay a exprimé son intention de poursuivre le dialogue avec N’Djamena, mais aucun calendrier pour le retrait des troupes françaises n’a encore été fixé.
Ce bouleversement souligne les transformations en cours dans les relations entre la France et ses anciens partenaires africains. Plus qu’un simple désaccord bilatéral, la décision tchadienne s’inscrit dans une dynamique régionale plus large, où les États cherchent à affirmer leur autonomie face à une présence étrangère perçue comme déclinante.
Issa Djiguiba