À l’issue de la rencontre tenue dans la capitale tchadienne, les dirigeants de l’organisation sahélienne ont décidé de muscler davantage les actions militaires et d’intensifier les activités de lutte contre la précarité
Les rideaux sont tombés sur les travaux de la 7è session ordinaire de la Conférence des chefs d’État du G5 Sahel lundi à N’Djamena. Le président en exercice sortant, le Mauritanien Mohamed Ould Cheikh Ghazouani, a passé le témoin en remettant le fanion représentant le drapeau de l’organisation à son homologue du Tchad, le maréchal Idriss Deby Itno qui préside désormais aux destinées de l’organisation sahélienne.
Le président tchadien s’est réjoui de cette confiance que lui ont portée ses pairs pour la deuxième fois. “Le Tchad a l’honneur d’assurer la présidence du G5 Sahel et il exercera ce mandat avec le concours de tous, car depuis la naissance de notre organisation, tout le monde a fait montre d’une solidarité sans faille”, a souligné le nouveau président en exercice, ajoutant que sa détermination et son engagement à soutenir le G5 Sahel n’ont jamais fait l’objet d’un doute.
“Nous avons toujours oeuvré à l’unisson quand il a été question de prendre les grandes décisions pour la survie et la bonne marche de notre institution”, a relevé le maréchal Idriss Deby Itno.
La lutte contre le terrorisme et le développement sont désormais les deux piliers des actions de l’organisation sahélienne. Dans le cadre de l’action militaire, le Tchad enverra des troupes dans la zone des trois frontiers, la France renonce à réduire ses effectifs, des actions diplomatiques vont être menées pour trouver des financements pérennes pour la force conjointe en la plaçant sous le chapitre 7 de l’ONU. Pour ce qui concerne le développement, les financements sont prévus pour de nombreux projets.
SUCCÈS DIPLOMATIQUE- La situation sécuritaire difficile que traverse notre pays a fait l’objet d’une attention particulière de la part des dirigeants du G5 Sahel. “La paix au Mali doit constituer un point majeur de nos préoccupations, ainsi que le développement du G5 Sahel. Nous soutenons les efforts de dialogue politique entre le gouvernement de la Transition dirigé par le président Bah N’Daw et les différentes parties pour la mise en oeuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali. Nous suivons avec une grande attention les conclusions des travaux du Comité de suivi de l’Accord et exhortons tous les acteurs maliens à travailler pour une paix durable dans ce pays frère”, a souligné le maréchal Idriss Deby Itno.
Le président de la Transition Bah N’Daw a sans nul doute réussi à convaincre de la pertinence des options que la Transition a prises à la fois sur le processus de paix et sur les arrangements politiques permettant d’aboutir à des élections crédibles. Sa tournée régionale en prélude au sommet lui a permis de faire comprendre les enjeux de la crise que traverse notre pays. Le succès diplomatique majeur est indéniable.
Le président mauritanien passe le témoin à son homologue tchadien
Abordant la situation globale du Sahel, le nouveau président en exercice du G5 Sahel s’est dit conscient des enjeux et défis qui l’attendent. “Avec ce sommet, nous entrons dans la 2è année d’un contexte extrêmement difficile de l’existence de notre organisation. Contexte marqué par cette pandémie de Covid-19 qui nous déclare une guerre sans merci. Autant nous faisons face au terrorisme avec une grande détermination, autant notre combat contre la Covid-19 se fera avec la même détermination, a détaillé le président Itno.
Le sommet de Pau a marqué une étape cruciale dans le partenariat du G5 Sahel. Il a donné une grande impulsion aux orientations et actions de lutte contre le terrorisme et le développement dans le Sahel. “Nous nous réjouissons des résultats obtenus en si peu de temps, grâce à la feuille de route que nous avons adoptée ensemble et à la fréquence de son suivi. À cet égard, je salue l’action exemplaire de la Task Force Takuba et de Barkhane qui constituent la preuve de la mutualisation des efforts que nous appelons de tous nos voeux. La Coalition pour le Sahel est un instrument clé de notre partenariat et qui nous permettra de mutualiser efficacement nos efforts, mobiliser nos ressources et coordonner nos initiatives pour cette lutte”, a défendu le président Itno, ajoutant que la force conjointe G5 Sahel reste le point central de “notre dispositif sécuritaire”.
APPUI À LA FORCE CONJOINTE- À la fin des travaux, les chefs d’État ont réaffirmé leur détermination à poursuivre la lutte contre le terrorisme, à travailler à la réinstallation des populations déplacées internes et à accélérer le retour de l’État dans les zones sécurisées. Ils se sont félicités de l’approbation, par l’Union africaine, de la requête relative à l’appui de la capacité opérationnelle de la Force conjointe pour un montant de 20 millions d’euros, à travers la Facilité africaine de paix (APF). Ils ont adressé leurs remerciements à l’Union africaine et à l’Union européenne pour leurs appuis respectifs. Ils ont réitéré aussi leur appel lancé à la communauté internationale et au Conseil de sécurité des Nations unies pour un soutien conséquent à la Force conjointe en la plaçant sous le Chapitre VII de la Charte des Nations Unies et en lui assurant un financement pérenne. Ils ont exprimé le souhait de la création d’un Bureau des Nations unies spécialement dédié au soutien à la Force conjointe.
Les chefs d’État ont également salué les actions développées par l’Alliance Sahel dans le cadre du financement des projets de développement et particulièrement la finalisation de la conception de la Facilité G5 Sahel portée par le ministère allemand de la Coopération économique et de développement (BMZ), pour une enveloppe initiale de 50 millions d’euros, dont le démarrage est prévu pour 2021 en accompagnement au Plan d’actions du Cadre d’actions prioritaires integre (CAPI). Ils ont souligné la pertinence de l’initiative, sa cohérence avec les besoins des pays du G5 Sahel. Ils ont, par ailleurs, invité les autres partenaires à accompagner le processus.
Par ailleurs, les dirigeants du G5 Sahel ont décidé, sur initiative de la République islamique de Mauritanie, de mettre en place un prix dénommé «Prix du Sahel pour la promotion de la culture de la paix» décerné aux individus, institutions ou organismes publics, privés ou de la société civile ayant le mieux œuvré pour la prévention et la résolution des conflits et pour la culture de la paix et de la tolérance entre les communautés dans l’espace Sahel. Ils ont à cet effet instruit le Conseil des ministres et le Secrétariat exécutif de travailler à la mise en place des mécanismes de ce prix.
Sur la situation au Mali, les chefs d’État ont salué la tenue, le 11 février 2021 à Kidal, de la cinquième réunion de haut niveau du Comité de suivi de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, issu du processus d’Alger. Ils ont encouragé les parties prenantes à consolider cette dynamique positive et exhorté la communauté internationale à renforcer son soutien au Mali durant cette phase de Transition afin de réaliser des progrès substantiels notamment dans le volet défense et sécurité dudit Accord. Il ont réaffirmé leur attachement à l’unité et à l’intégrité de la République du Mali. Ils se sont aussi félicités de la mise en place de l’ensemble des organes de la Transition et renouvelé leur disponibilité à accompagner le processus en cours tout en appelant de leurs vœux sa pleine réussite. Par ailleurs, notre pays accueillera le prochain sommet ordinaire du G5 Sahel en février 2022.
Envoyé spécial
Moriba COULIBALY
Les coulisses :
SÉCURITÉ INTRANSIGEANTE
Il fallait montrer patte blanche pour accéder à la salle de conférences du sommet du G5 Sahel. Tous les participants, à l’exception évidemment des chefs d’État, étaient obligés de se soumettre à la fouille corporelle en règle et aux vérifications minutieuses de tout l’appareillage qu’ils transportaient que vous soyez délégués, hommes de presse, hôtesses.
Les agents de sécurité avec courtoisie demandaient à chaque passant, après le détecteur de métaux, d’ouvrir le sac et d’étaler tout son contenu. Ainsi, les appareils électroniques comme les ordinateurs et les appareils photos étaient allumés pour test, les stylos essayés à l’écriture sur une surface papier et enfin la palpation corporelle pour s’assurer que l’intéressé ne transporte aucun objet illicite. Les matériels interdits étaient tout simplement confisqués. Un collègue a eu le malheur de faire une photo des personnes alignées pour passer le portique de sécurité, l’agent de sécurité qui s’en est aperçu, a confisqué l’appareil et lui a demandé les raisons de son geste.
Il lui a été demandé de supprimer ces images avant de poursuivre le processus de contrôle. Après la fouille corporelle, le participant recevait quelques gouttes de gel hydroalcoolique dans ses mains. Il pouvait ensuite passer par le portique de désinfection où des vapeurs étaient projetées sur les personnes et le matériel.
LA VISION DU MARÉCHAL IDRISS DEBY ITNO
Le bulletin d’information et d’analyse du comité national de coordination des actions du G5 Sahel du Tchad a édité un fascicule de 8 pages pour les participants au sommet. Ce numéro spécial a publié un éditorial qui annonce la vision du président en exercice rentrant. Elle se résume à quatre points, à savoir “Accélérer le développement” ; “Créer des synergies entre les divers instruments d’intervention” ; “Renforcer les échanges rapides d’information et de renseignement” ; et enfin “Lutter contre l’expansion de la pandémie de la Covid-19 au Sahel”.
MUSICIENS DÉGUISÉS
Des musiciens sollicités pour l’animation musicale sur le site du sommet portaient tous des badges estampillés “Presse”.
Apparemment, les organisateurs n’ont pas pu leur trouver des pièces adaptées à leur cas pour l’accès au site.
Envoyé spécial
M. C.
Source L'Essor